«Credit Crunch» et marges élevées: les problèmes auxquels les investisseurs immobiliers professionnels sont actuellement confrontés

22/08/2024

Mathias Rinka

Immoday

4 min

La Banque nationale suisse (BNS) est soudain devenue pionnière en matière de comparaison internationale. Grâce à la baisse des taux directeurs, elle s'est hissée en pole position au premier semestre 2024 et a (également) soutenu le marché suisse de l'investissement immobilier. Les experts immobiliers envisagent de nouvelles baisses des taux d'intérêt de la part du nouveau président de la Banque nationale, Martin Schlegel, qui prendra ses fonctions le 1er octobre.

 

Après la baisse hausse des taux d'intérêt de la BNS en mars 2024, la Banque centrale européenne (BCE) a été l'une des premières à emboîter le pas en juin : elle a également abaissé son taux d'intérêt directeur pour la zone euro de 25 points de base, à 4,25 pour cent. Un peu plus tard, la BNS a encore augmenté la mise et abaissé son taux directeur à 1,25 pour cent.
 

La FED (Federal Reserve Bank) aux États-Unis n’a jusqu’à présent pas été impressionnée. La fourchette des taux d'intérêt directeurs reste à un niveau relativement élevé de 5,25 à 5,5 pour cent. La plupart des observateurs du marché s'attendent actuellement à une première baisse des taux d'intérêt en septembre. Toutefois, certains acteurs du marché estiment également que les taux d'intérêt directeurs aux États-Unis resteront à leur niveau actuel. On dit qu’ils ne pourraient que commencer à baisser avec le nouveau président.
 

En Suisse, en revanche, la situation actuelle des taux d’intérêt suscite un optimisme prudent. Le taux swap à 10 ans (base taux de marché/taux d'intérêt pour les prêts hypothécaires à taux fixe à 10 ans), par exemple, est désormais de 0,77% (au 15 août 2024), de retour au niveau de mars 2022 et donc d'un soit 1,56 point de pourcentage en dessous du sommet de 2,33% d'octobre 2022. Ainsi, certaines augmentations de capital de fonds immobiliers ou de sociétés immobilières sont à nouveau sursouscrites et de nouvelles baisses des taux d'intérêt sont attendues ou du moins considérées comme possibles au cours des douze à 18 prochains mois. 
 

Le resserrement majeur du crédit redouté dans de nombreux endroits, le fameux «credit crunch», ne s’est pas (jusqu’à présent) matérialisé. Même s'il est désormais devenu beaucoup plus difficile pour les investisseurs immobiliers d'obtenir le financement qu'ils souhaitent aux conditions qu'ils espéraient. La réticence des investisseurs n'était pas principalement due au retournement des taux d'intérêt, mais plutôt à d'autres incertitudes, telles que les faillites, les changements réglementaires (mot clé : finalisation de Bâle III) ainsi que les changements de marché liés à la fusion UBS/CS. Avec la baisse des taux d'intérêt, l'appétit pour le financement hypothécaire augmente à nouveau et les fonds de pension, les fondations de placement et les fonds immobiliers deviennent également plus actifs sur le marché des transactions.
 

Donato Scognamiglio, président du conseil d'administration d'IAZI AG, considère de manière positive que la BNS ait abaissé les taux d'intérêt. Il estime qu'avec une immigration toujours élevée et une offre restreinte sur les marchés immobiliers résidentiels suisses, les prix resteront stables et augmenteront à nouveau à moyen terme. La liquidité est actuellement un «enjeu majeur», notamment lié au financement immobilier. Avec la nouvelle réglementation, les banques devraient déposer davantage d'argent auprès de la BNS, ce qui entraînerait en revanche un octroi plus restrictif des crédits hypothécaires.
 

Patrick Zurfluh, responsable du financement immobilier chez Loanboox, explique que grâce aux récentes baisses des taux directeurs, la situation liée au financement immobilier commercial s'est à nouveau détendue. Il estime que les emprunteurs de ce segment renouvellent de plus en plus leurs échéances à long terme. «La BNS a été la seule parmi les banques nationales occidentales à agir de manière proactive et non réactive, ce qui a porté ses fruits jusqu'à présent.» Il suppose que la Banque nationale suisse pourrait également procéder à de nouveaux ajustements en réponse à une baisse des taux d'intérêt de la FED. Toutefois, les banques centrales des États-Unis et de l'Union européenne subiraient une pression croissante si elles poursuivaient une politique monétaire trop réactive et suivaient en permanence l'évolution de la situation, selon Zurfluh.
 

Il note également que les marchés liés au crédit deviennent de plus en plus volatils : le «meilleur» partenaire en financement actuel pourrait faire en quelques semaines des offres bien pires qu'un autre investisseur – et vice versa. Dans la situation actuelle, il est probablement plus important d'avoir un accès facilité au plus grand nombre de prêteurs hypothécaires possible et de comparer attentivement les offres en financement immobilier.
 

Arno Kneubühler, CEO de Procimmo AG, gestionnaire d'actifs dans le segment de l'immobilier industriel, s'attend à ce que les taux d'intérêt en Suisse se stabilisent en 2025, «en fonction des nouveaux chiffres de l'inflation et de l'immigration». Il estime toutefois qu’il est peu probable que la courbe des rendements revienne à un niveau zéro. Pour Arno Kneubühler, les nouvelles réglementations bancaires via Bâle III jouent également un certain rôle sur le marché du financement, car les nouvelles exigences en fonds propres ont déjà conduit à des marges plus élevées.
 

Christoph Syz, CEO et co-fondateur de Patrimonium Asset Management AG, s'attend lui à ce que les taux d'intérêt évoluent de façon «latérale» dans un avenir proche. Il existe toutefois une pression supplémentaire sur les marges des banques prêteuses en raison de la fusion majeure entre l'UBS et le Crédit Suisse, insiste-t-il. Cela a déjà poussé certains acteurs du marché à changer de banque et, par exemple, à frapper aux portes des banques cantonales. Mais eux aussi « serrent un peu la vis » dans ce domaine, estime Christoph Syz.

 

Mathias Rinka - Immoday.ch