Il y a un vrai potentiel d’investissement en immobilier chez les clients privés

14/04/2021

Olivier Toublan

Immoday

3 min

Même si l’on n’atteindra probablement jamais le niveau des caisses de pension, il y a un vrai potentiel d'allocations supplémentaire dans l’immobilier chez les clients privés. Car eux aussi recherchent des rendements stables. C’est du moins l’analyse de Zsolt Kohalmi, responsable des investissements immobilier de la banque privée genevoise Pictet.

 

Pour Zsolt Kohalmi, responsable des investissements immobilier de la banque privée genevoise Pictet, l’immobilier est une classe d’actif encore un peu méconnue par les clients privés. Il estime donc qu’il y a un gros potentiel dans ce secteur, d’autant que les différents véhicules d’immobilier direct et indirect à la disposition des investisseurs permettent aujourd’hui de satisfaire tous les profils de risque et toutes les exigences de rendement.

 

Zsolt Kohalmi, quelle est la part de l'immobilier dans l'asset allocation de vos clients ?

Il me paraît difficile de faire des généralités devant la spécificité de chaque client. Ceci dit, la part de l'immobilier dans le portefeuille des clients privés est souvent inférieure à 5 %. J’estime que c'est trop bas pour des clients privés, orientés sur la préservation de leur fortune sur le long terme. Si je regarde les investisseurs institutionnels suisses, qui investissent eux aussi sur le long terme et qui ont longuement réfléchi à leur allocation d'actifs, on constate que l'immobilier représente, en moyenne, entre 13% et 19% de leur portefeuille. On devrait pouvoir tendre vers ce niveau-là pour les clients privés également.

Il y a donc un gros potentiel pour les investissements dans l'immobilier, direct et indirect.
Il y a en tout cas un potentiel d'allocations supplémentaire. Même s’il sera difficile d’atteindre sur le court terme le niveau des caisses de pensions.

La tendance est néanmoins à la hausse, car pour certains investisseurs, l'immobilier vient remplacer les obligations.
On peut le comprendre, avec des taux obligataires parfois négatifs aujourd'hui, comme pour les obligations de la Confédération. Dans ce cas, l'immobilier est une bonne alternative. Mais attention, si l’on souhaite bénéficier d’une certitude comparable à celle des rendements obligataires, il faut privilégier l’investissement dans des actifs stabilisés, qui nécessitent une gestion active limitée, et qui délivrent un rendement stable.

Pourtant, les prix de l’immobilier peuvent rapidement baisser, on l'a vu ces dernières années
L’une des choses que j’ai appris ces 26 dernières années est que le marché de l’immobilier est comparable à un organisme vivant. En effet, il change tout le temps. Il faut veiller à investir de manière régulière dans l’entretien de ses biens, garder en tête que les prix varient et qu’il y a des coûts annexes, c’est donc bien plus complexe que les obligations. De plus, il faut  prêter attention  aux mega  trends  et à leur impact

sur les besoins des occupants à long terme, afin de pouvoir positionner son portefeuille immobilier en conséquence, de manière à rester compétitif sur le marché pour les années à venir.

Vous parliez de la liquidité, qui est assez faible pour l'immobilier. Est-ce un problème ?
Oui elle est faible, mais non ce n'est pas un problème. On sait que l'immobilier n'est pas une classe d'actifs liquide. Il faut du temps pour acquérir de bons immeubles, et il faut du temps pour les vendre au meilleur prix. Si vous voulez de l'immobilier liquide, vous achetez des fonds cotés, mais ça comporte aussi des risques. Prenez l'exemple d'un fond ouvert. Si, quand le marché baisse, tous les investisseurs veulent se  retirer en même temps, le fond va être contraint de vendre ses actifs, à des prix qui ne seront pas forcément optimaux. L’illiquidité peut donc agir comme une mesure de protection pour les investisseurs.


Et le niveau des agios, qui est assez élevé pour les fonds côté, est-ce que cela vous inquiète?
L’immobilier n'est pas décorrélé de l’économie. Les afflux d’argent frais que l’on a observé ces derniers temps poussent tous les actifs vers le haut. Ceci dit, le fait que les agios ne cessent de progresser n'est pas vraiment un problème en soi. Ca montre seulement que les investisseurs sont d’accord de voir leur rendement baisser, pourvu qu’il soit stable. Parce que, de toute manière, ça sera toujours plus intéressant que l'obligataire.


Ne pensez-vous néanmoins que l'immobilier suisse est actuellement cher ?

Effectivement, c'est dû à la combinaison que l'on connaît de taux d'intérêt historiquement bas et de capitaux abondants. C'est pour ça que je conseille à nos investisseurs de regarder un peu vers l'immobilier international, où les prix sont souvent plus attractifs. Les caisses de pension suisses pourraient bénéficier d’une telle diversification, à mon avis.

 
Olivier Toublan pour Immoday