Les locataires vont souffrir en 2023

13/02/2023

Olivier Toublan

Immoday

5 Min

Jamais le taux de vacance n'avait autant baissé en l'espace de douze mois qu'en 2022. Dans de nombreux endroits, la pénurie de logement s'approche, et aucun signe d’une augmentation du nombre de constructions. Ce qui va entraîner une forte hausse des loyers, pour les nouveaux locataires, mais aussi pour les locataires déjà en place.

 

Les prochains mois s'annoncent vraiment moroses pour les locataires, qui devraient subir à nouveau une forte hausse des loyers. C'est du moins ce que montrent toutes les statistiques immobilières, telles qu'elles sont résumées dans la dernière étude publiée par les experts de Raiffeisen, dans le dernier numéro de Immobilien Schweiz. Ils prévoient, dans de nombreux endroits, un manque, voire une pénurie de logements. 
 

Pour eux, le constat est clair : " avec un recul en 2022 de 1,54% à 1,31% du parc total, jamais le taux de vacance n'avait autant baissé en l'espace de douze mois qu'en 2022".  

 

Le taux de vacance va continuer de baisser  
 

Pire, les économistes de Raiffeisen estiment que ce taux de vacance va continuer de baisser. En effet, « les demandes de permis de construire déjà déposées permettent d'estimer de manière fiable la production de logement des deux prochaines années et de prédire la direction que prendra le marché suisse du logement. » Le problème, c’est que le nombre de demandes déjà déposées ne permet pas d'anticiper un retournement du marché. 
 

Comme l'expliquent les économistes, cette pénurie était prévue depuis longtemps. Les causes en sont connues. L'immigration ne ralentit pas et "elle stimule une demande de logements déjà très active, en particulier celle de logements locatifs". Quant aux raisons pour lesquelles la production de logement ne suit pas la hausse de la demande, elles sont, elles aussi, connues, du prix des terrains aux chicaneries administratives, en passant par la multiplication des recours. Sans oublier l'envol du coût des matériaux de construction et de la main d'œuvre, poussés à la hausse par le retour de l'inflation.
 

Dans ce contexte, et même si, pour la première fois, les loyers en 2022 sont repartis à la hausse, après des années de baisse, cela n'est pas suffisant pour justifier de nouveaux investissements dans l'immobilier, assurent les économistes de Raiffeisen. 

 

Une hausse des revenus locatifs insuffisante pour les propriétaires  
 

"La hausse de 1,5% des revenus locatifs en 2022 n'est pas encore proportionnelle à la nette augmentation des coûts de financement, des coûts de construction et des prix des terrains, avec lesquels les développeurs de projets doivent calculer dans le contexte actuel du marché. Seule une hausse nettement plus forte des nouveaux loyers pourrait, dans le contexte actuel du marché, créer les incitations nécessaires à la production de davantage de nouveaux logements".  
 

Et ceci même si "la commercialisation des nouveaux logements n'a jamais été aussi facile depuis longtemps". En effet, au cours des deux dernières années, environ 90 000 nouveaux logements ont été construits et à peine plus de 5% n'ont pas (encore !) trouvé de locataire ou de propriétaire. Il y a deux ans, ce taux était encore de 11%, rappellent les économistes de Raiffeisen.

 

Les temps sont durs pour les nouveaux locataires   
 

Quoi qu'il en soit, si l'on en croit les prévisions de la banque, d'ici 2024, le taux de logements vacants devrait passer sous la barre des 1%. Avec, il faut quand même le préciser, des différences importantes entre les régions. Selon les dernières statistiques, les cantons de Genève, Zurich et Zoug affichent déjà des taux de vacance des logements locatifs nettement inférieurs à 1%. "Ici, on peut effectivement parler depuis longtemps d'une situation de pénurie". Par contre, au Tessin, à Soleure et dans le Jura, les marchés du logement locatif sont encore très fluides avec des taux de vacance des logements locatifs supérieurs à 5%. 
 

Mais revenons à la moyenne suisse. Ce n'est pas la première fois que le taux de vacance passe sous la barre des 1 % ces 20 dernières années (on a déjà vu un tel taux entre 2003 et 2005, ainsi qu'entre 2008 et 2013). Ce qui donne d'ailleurs une bonne base de comparaison. Car pendant ces périodes, on avait observé une croissance annuelle des loyers proposés nettement supérieure à 3%. "Il en sera de même cette fois-ci, car aucun signe de détente n'est perceptible dans une perspective à moyen terme. Les nouveaux locataires vont donc devoir affronter des temps difficiles". 

 

Les locataires en place ne seront pas non plus épargnés

 

Les hausse de loyers ne devraient pas non plus épargner les locataires en place, estiment les experts de Raiffeisen. Ils prévoient en effet que le taux hypothécaire de référence devrait encore augmenter deux fois d'ici 2024. "Dans la mesure du possible, les bailleurs répercuteront cette hausse sur les locataires". En outre, 40% de l'inflation, actuellement nettement plus haute que la moyenne de ces dernières années, peuvent être répercutés sur les locataires, conformément au droit du bail. Ce qui, selon les calculs des économistes, devrait représenter une hausse des loyers de près de 10 % d'ici 2024, "soit deux augmentations de 3% dues à deux adaptations du taux d'intérêt de référence, 2,5% supplémentaires résultant de la répercussion de 40% du renchérissement annuel, ainsi qu'environ 1% supplémentaire dû à l'augmentation générale des coûts". Donc, pas de miracle pour les locataires en place, et pas non plus de contestation possible, puisque c'est ce que prévoit le droit du bail, pour préserver le pouvoir d'achat du capital propre des bailleurs.


 

Olivier Toublan, Immoday