Pour parler sérieusement de durabilité, il faut une approche globale, pas seulement s'intéresser au chauffage

26/09/2022

Immoday

Olivier Toublan

3 min

 

Passer des énergies fossiles à l'électricité quand on fait une rénovation, c'est bien, mais ce n'est pas suffisant si l'on n'essaie pas en même temps d'améliorer l'efficience énergétique de tout l'immeuble. Sans oublier de tenir compte de l'eau, qui est également une ressourcer rare, à gérer en conséquence. Bref, une approche globale est nécessaire si l'on se dit sérieux dans son approche de la durabilité.

 

La durabilité est devenue aujourd’hui LE sujet incontournable de l'immobilier. Que ce soit avec des intentions sérieuses d'améliorer la consommation énergétique de son parc immobilier ou simplement comme argument marketing, tout le monde en parle. Et de nombreuses entreprises de conseils s'engouffrent sur ce créneau. Certaines plus sérieuses que d'autres, comme Signa-Terre, active dans le domaine depuis 14 ans, soit bien avant que la durabilité soit à la mode. Ce qui a permis à cette entreprise genevoise de développer toute une panoplie d'outils d'analyse et de conseils en matière de durabilité, avec une expertise désormais largement reconnue. On en parle avec Yannick Tinguely, directeur Suisse allemande de Signa-Terre.

 

Yannick Tinguely, si l'on devait résumer en deux phrases ce qu'est Signa-Terre ? 
 

Signa-Terre est une société de conseil en gestion énergétique de l'immobilier dans le but de réduire son impact environnemental. Nos services permettent d'ausculter l’efficacité énergétique des immeubles. Nous proposons divers outils aux professionnels pour gérer leurs actifs de manière durable. Notre objectif est d'identifier le potentiel d'économie énergétique et financière des bâtiments et de proposer des solutions appropriées à cet effet.

 

Une entreprise qui a déjà 14 ans. 
 

En effet, elle a été fondée en 2008, bien avant que la durabilité ne soit à la mode, par Laurent Isoard, ingénieur en électricité de formation, avec un long parcours informatique en technique et maintenance tournée vers l’énergétique du bâtiment, et Olivier Ouzilou, ancien directeur du Service cantonal genevois de l’énergie.

 

Combien de personnes travaillent chez Signa-Terre ? 
 

Nous sommes actuellement 45 personnes. Nous étions encore 25 il y a 3 ans, ce qui montre que la problématique de la durabilité immobilière devient de plus en plus importante pour les propriétaires et les investisseurs.

 

Vous avez beaucoup de clients ? 
 

Actuellement, nous analysons 10'000 immeubles en Suisse, ce qui représente entre 70 et 80 portefeuilles-clients. C'est important, mais ça reste une goutte d'eau dans le parc immobilier Suisse, où l'on parle de millions d'immeubles. Il faut cependant préciser que nous nous concentrons sur les gros investisseurs, les fonds immobiliers, les assurances, les caisses de pension, bref tous ceux qui possèdent un portefeuille immobilier important, qui ont besoin d'une vision globale de leur parc, tout en ayant une analyse précise de chacun de leurs immeubles.

 

A ces clients, quels services proposez-vous ? 
 

Nos services de base sont ImmoLabel et ImmoData-PRO, des outils de mesure qui établissent chaque année un diagnostic quantifié de la consommation énergétique d'un bâtiment, pour déterminer non seulement son niveau, mais aussi son efficience, si on peut l'améliorer, et comment. Ce qui permet d'attribuer une étiquette à chaque immeuble - de A à G. Chaque immeuble est ensuite contrôlé annuellement afin de déterminer l'évolution, positive ou négative, de sa consommation énergétique.  En parallèle, nous élaborons un plan d’investissement à long terme avec une simulation de la réduction de consommation d’énergie et d’émission de CO2, afin de définir la feuille de route pour atteindre les objectifs fixés par la confédération, à savoir la neutralité carbone pour 2050.

 

Quand vous dites consommation énergétique, vous parlez uniquement du chauffage ?  
 

Pas seulement. Nous avons une approche globale, qui englobe le chauffage, mais aussi l'électricité et l'eau.

 

L'eau ? C'est important ? 

 

Pas en termes d'émission de CO2, mais l'eau est aussi une ressource épuisable même si, en Suisse, nous sommes privilégiés, car elle est abondante. Ce qui n'empêche pas d'être responsable en l'utilisant de la manière la plus efficiente possible. Dès lors, si la consommation en eau d'un immeuble est anormalement haute, il faut pouvoir agir. D'autant plus que l'eau coûte très cher, plus cher que l'électricité aujourd'hui, et qu'optimiser sa consommation permet de diminuer les charges pour les locataires.

 

Ça intéresse vraiment vos clients ?  
 

Ils se focalisent surtout sur le thermique et les émissions de CO2. Il est vrai que cela représente 85 % de la consommation énergétique d'un bâtiment en Suisse. Mais là encore, nous prônons une approche globale, qui ne se limite pas aux énergies fossiles, mais englobe aussi l'électricité.

 

Pourquoi ? L'électricité, c'est une énergie quasi propre, non ?  
 

Oui, mais pas entièrement. D'ailleurs, le problème n'est pas là. Aujourd'hui, quand un propriétaire fait une rénovation, il cherche à se débarrasser des énergies fossiles. C'est bien. Mais s'il n'y a pas une réflexion en amont, le problème de la consommation énergétique globale ne sera pas résolu, simplement déplacé. Prenons l'exemple d'un immeuble extrêmement énergivore, avec une mauvaise isolation. Avant de remplacer le fossile par de l'électrique, il faut d'abord tenter d'optimiser la consommation énergétique de l'immeuble dans son ensemble et pas seulement se focaliser sur l'efficience du système de chauffage. Par ailleurs, produire de l'électricité n’est pas toujours neutre en CO2 et ça coûte très cher. Il faut donc aussi chercher des moyens de diminuer la facture, par exemple avec du solaire ou des pompes à chaleur. Tout ça pour dire qu'une approche globale est vraiment nécessaire.

 

Combien coûte ImmoLabel ?  
 

600 francs par année et par entrée d'immeuble.

 

ImmoLabel, c'est un constat. Que fait-on ensuite, au-delà du constat ?  
 

Comme mentionné, nous proposons un deuxième service, ImmoData-Pro. Ici, nous analysons tous les aspects techniques de l'immeuble et de sa consommation énergétique, la façade, les toits, les fenêtres, etc. Ce qui va nous permettre de déterminer concrètement ce que l'on peut améliorer, puis prévoir un plan de rénovation et d'investissement, avec plusieurs variantes concrètes qui précisent à chaque fois les coûts d'investissement et les gains de consommation, en ayant toujours en ligne de mire l'objectif 2050 de neutralité carbone.

 

Et ensuite, si l'investisseur accepte votre plan de rénovation ? 
 

Ensuite, nous accompagnons les propriétaires lors des travaux, que ce soit pour des rénovations ou la construction d'un immeuble neuf. Y compris pour aller chercher des subventions, au niveau fédéral et au niveau cantonal. Nous faisons office de conseiller neutre et nous garantissons le suivi des objectifs de consommation énergétique. Pour être sûr que le chantier respecte les normes, pour éviter des incohérences, et pour que, finalement, la consommation réelle soit bien conforme aux objectifs. Ce qui, il faut le dire, n'est pas toujours le cas : en matière de consommation énergétique il y a souvent un écart important entre ce que promettent les plans des architectes et la réalité.
 

Yannick Tinguely

Geschäftsführer Deutschschweiz / Directeur Suisse allemande


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Olivier Toublan pour Immoday