Pour une rentabilité à long terme, il faut investir dans des villes intelligentes
03/07/2024
4 min
Les investisseurs institutionnels suisses continuent d’investir dans les biens immobiliers, en Suisse pour beaucoup, mais sont de plus en plus nombreux à compléter leurs positions avec des solutions d’immobilier étranger. Mais comment investir durable en ces temps d'urbanisation galopante et pas toujours ordonnée ? Même si elles sont difficiles, des solutions existent. Avec, au final, des biens immobiliers mieux pensés. Et donc plus rentables à long terme.
Depuis plus de 20 ans, le marché immobilier suisse est resté très porteur. Néanmoins, les investisseurs sont aujourd'hui confrontés à la taille relativement réduite du marché domestique, et parfois à une concentration trop élevée de leur portefeuille.
Ainsi, nombre d’entre eux investissent au-delà des frontières helvétiques, accroissant leur diversification géographique. De plus, l’importante dépréciation du capital qui a eu lieu ces derniers semestres sur les marchés immobiliers internationaux offre un argument supplémentaire et un point d’entrée potentiellement attractif.
Ça tombe bien, puisque que les villes du monde entier continuent de connaître une croissance démographique rapide et une urbanisation galopante.
Par ailleurs, l’attrait d’un secteur immobilier orienté vers l'avenir, anticipant les besoins d'une ville intelligente et s'adaptant aux futurs développements démographiques gagne en importance.
Il est par exemple crucial de surveiller les activités de développement urbain et de répondre aux besoins sociaux en consultation avec les conseils municipaux. Les promoteurs prennent en compte tous les besoins des citoyens, qu'ils concernent la mobilité, la taille des espaces urbains, la connectivité, mais aussi la qualité de l'air, de l'eau, la pollution, sans oublier tous les problèmes de gouvernance, de régulation, ou d'accès aux soins.
Sur le principe, tout le monde est d'accord. Mais pour un investisseur n'est-ce pas un peu la quadrature du cercle : être "smart" tout en générant des rendements suffisants?
Difficile, d'accord, mais pas impossible
À vrai dire, si c'est certes difficile, ce n'est pas impossible, comme nous l'ont montré, lors d'une conférence "Smarter Cities" qui a eu lieu à Lausanne, début juin, deux experts du secteur, Michel Gerber, Responsable de la construction au sein de la Fondation d'investissement Avadis, et Andreas Dick, Spécialiste senior des fonds et marchés immobiliers au sein de la Fondation d'investissement immobilier à l'étranger AFIAA.
Mais commençons par quelques chiffres: la population mondiale devrait atteindre 10 milliards d'habitants d'ici 2050, dont plus de 6 milliards vivront dans des zones urbaines. Cette urbanisation sans précédent pose d'importants défis, notamment en matière de gouvernance, de développement économique, de soins de santé, de sécurité, de consommation d'énergie, de pollution, de mobilité et de préservation des espaces verts.
La Suisse, bien que sur une plus petite échelle, n'est pas épargnée par ces défis. D'autant plus que le secteur immobilier est un gros consommateur d'énergie et un important émetteur de carbone (40% du total suisse, selon les estimations).
Dans ce contexte, résume Michel Gerber, il devient primordial de faire des choix judicieux en matière d'investissement immobilier et de gestion des bâtiments.
Quelques exemples de projets immobiliers durables
Mais, concrètement, que signifie "un choix judicieux en matière d'investissement immobilier" ? Michel Gerber a pris plusieurs exemples de projets menés par la Fondation d’investissement Avadis.
D’abord, la rénovation et le repositionnement d'un immeuble de bureaux à Berne en logements, privilégiant la réutilisation des structures existantes et la mise en œuvre de solutions d'énergie renouvelable.
Ensuite, un nouveau quartier résidentiel écologique près de la gare de Wettingen, doté de panneaux solaires, de bornes de recharge pour véhicules électriques et de chauffage urbain.
Et enfin, un projet de développement urbain comme celui de La Petite Prairie à Nyon, intégrant lui aussi des panneaux solaires, des bornes de recharge pour véhicules électriques et contribuant à un quartier animé et durable.
Mieux vaut rénover que détruire pour reconstruire
Andreas Dick a détaillé ensuite un projet mené par l’équipe d’immobilier direct AFIAA Global: l’immeuble Gresham Saint-Paul, construit en 1998 au cœur du centre financier de Londres et à proximité de sites culturels emblématiques.
Trois options s'offraient aux architectes. Conserver l'immeuble, bien que vieillissant, sans le toucher. Avec, selon les calculs, des émissions annuelles de 719 kg de CO2 par personne pour le reste de la durée de vie de l'immeuble. La deuxième solution, souvent préférée par les architectes, aurait été de détruire l'immeuble et d'en construire un nouveau, plus grand, et avec une efficience énergétique plus élevée. Mais si l'on prend en compte toute l'énergie nécessaire pour la destruction puis pour la reconstruction de cet immeuble, les émissions annuelles de CO2 auraient été de 610 kg par personne.
En fait, la solution la plus efficiente s'est révélée être la rénovation. Elle a permis également d'augmenter la capacité de l'immeuble, et d'améliorer son efficience énergétique, mais avec des émissions de CO2 de seulement 553 kg. Alors, certes, ce n'est pas la solution la plus simple, mais, sur toute la durée de vie de l'immeuble, c'est clairement la plus durable.
Une nécessité pour garantir les rendements à long terme dans l'immobilier
Alors que les investisseurs institutionnels naviguent dans les défis de l'urbanisation et du changement climatique, l'adoption de pratiques immobilières durables n'est plus une option mais une nécessité. En privilégiant l'efficacité énergétique, les sources d'énergie renouvelables et la réutilisation adaptative, le secteur immobilier peut jouer un rôle crucial dans la création de villes plus intelligentes et plus résilientes pour les générations à venir.
Ce qui n'est d'ailleurs pas seulement un but noble mais aussi une décision d'investissement parfaitement raisonnable, puisque les institutionnels, étant investi en général sur le très long terme dans l'immobilier, se doivent de miser dans un environnement bâti qui répond aux objectifs de durabilité des locataires et des communautés. Autrement dit, repositionner leurs actifs immobiliers pour garantir qu’ils restent adaptés aux besoins des locataires, mais aussi qu'ils puissent s’adapter au changement, tout en fournissant une valeur durable malgré les chocs exogènes.