Ce qu'une gérance indépendante peut apporter à la direction d'un fonds

06/09/2021

Olivier Toublan

Immoday

3 min

Au-delà de la simple gestion des immeubles, une gérance indépendante, grâce à sa connaissance intime du marché local, peut aussi aider un fonds immobilier à remplir ses surfaces commerciales, difficiles à louer ces temps-ci, ou à dénicher des opportunités d’achat pour renforcer son portefeuille. Entre autres exemples.

 

Dans un précédent article, nous avions vu qu'il était sans doute plus efficient pour un fonds de placement immobilier de confier ses mandats de gérance à une entreprise externe plutôt que de le faire à l'interne. Mais concrètement, quels sont les domaines où une gérance immobilière indépendante apporte une véritable plus-value à un fonds de placement immobilier ? Les réponses de Jean-Jacques Morard, CEO de de Rham, un des noms les plus réputés parmi les gérances immobilières de Suisse romande.

 

Jean-Jacques Morard, concrètement, qu'est-ce que vous pouvez apporter à un fonds de placement qui vous confierait des mandats de gérance ?


Au-delà de la gestion au jour le jour des immeubles, nous pouvons apporter des plus-values intéressantes dans plusieurs domaines. Prenons un exemple simple. Quand un nouvel immeuble arrive sur le marché, il faut bien entendu le remplir. Pour ce qui est des appartements, ce n’est, a priori, pas trop difficile, mais pour les surfaces commerciales, c'est plus compliqué. Surtout aujourd’hui.

C'est là qu'une gérance comme la nôtre, qui est complètement immergée dans son marché local, peut apporter une plus-value. Nous savons qui pourrait être intéressé par ces surfaces commerciales, de quel type de surfaces le marché a besoin, les tailles optimales et quels sont les locataires de confiance. De plus, nous avons une équipe de marketing qui soutient les actions en vue de trouver des nouveaux locataires.

 

Y a-t-il aussi une concurrence sur les prix quand vous courtisez des investisseurs institutionnels ?


Nous sommes au prix du marché, nous ne voulons pas les baisser, notre objectif étant d'apporter un service de qualité. Par contre, comme nous avons des milliers d'objets en gérance, nous pouvons faire des économies d'échelle, et il est probable, pour certains fonds de placement, qu'il soit moins cher de passer par une gérance indépendante comme la nôtre que de recruter une équipe en interne.

Surtout si l'on prend également en compte tous les investissements d'infrastructure que nécessite la gestion des immeubles, le service juridique, le service marketing, le service informatique, pour les reportings financiers et le transfert des données. Au final, si on n'est pas un très gros fonds de placement immobilier, cela représente des coûts importants, qui vont peser sur la rentabilité.

 

Et ce genre d'arguments suffit à convaincre les institutionnels et les fonds de placement ?


Certains, oui. Certains institutionnels, convaincus, ne travaillent d'ailleurs qu'avec des gérances locales. Et pourquoi pas, après tout? Nous sommes de bons partenaires. Nous avons une grosse expérience de l'Immobilier institutionnel et indirect, nous connaissons leurs besoins et nous savons parler le même langage qu’eux.

Nous savons qu'ils ont des contraintes de résultats financiers, nous savons que les rénovations doivent être faites dans une logique de plus-value pour les immeubles et d'augmentation du rendement, nous savons qu'ils ont des budgets très serrés où tout doit être justifié.
 

 
Des budgets suffisants pour garantir la durabilité des immeubles, une question qui devient primordiale aujourd'hui ?


Les grands institutionnels et les fonds de placement sont dans une position inconfortable. D'un côté il y a une réelle volonté de rendre leurs immeubles plus durables, et des contraintes législatives qui s'empilent pour les obliger à le faire. Mais, de l'autre côté, le droit du bail n'est pas assez souple et freine ce type d'investissement énergétique.

Autrement dit, il est difficile de répercuter la totalité des investissements sur les loyers, ce qui impacte la rentabilité. C'est dommage, car on sait que, aujourd'hui, le bâti est responsable d'environ 30 % des émissions de gaz à effet de serre en Suisse, et qu'il y a beaucoup d'argent qui pourrait être consacré aux rénovations pour améliorer cette situation. Mais il faudrait que le droit du bail devienne plus souple et plus incitatif, et que les propriétaires puissent mieux répercuter ces investissements sur les loyers.

Surtout qu'à la fin, les locataires verraient une diminution de leurs charges, et qu'ils ne seraient pas forcément perdants dans l'opération. Mais là, c'est aux politiques d'agir. D'ailleurs, un peu paradoxalement, ce sont souvent les mêmes qui demandent plus d'investissements durables d’un côté et qui bloquent les loyers de l’autre.

 

Comme vous connaissez très bien le marché, est-ce que vous pouvez aussi aider les institutionnels et les fonds à acquérir des nouveaux immeubles, ce qui est aujourd'hui un des principaux problèmes pour tous les investisseurs ?


Effectivement. D’une part, nous analysons sans cesse les nouvelles opportunités foncières, dont nous parlons avec nos clients. D’autre part, pour l'immobilier construit, on a régulièrement des propriétaires qui nous approchent et qui veulent vendre.

Par exemple une petite caisse de pension qui doit verser des rentes et qui, pour ce faire, doit vendre une partie de ses immeubles. Des informations que nous communiquons à nos clients. Ensuite, s'ils sont intéressés pour rentrer en négociation, nous leur communiquons toutes les caractéristiques de l'immeuble, sa rentabilité, bref une masse de données pertinentes, que nous connaissons parce que nous assumons la gérance de cet immeuble.

 

Vous jouez donc parfois le rôle d'apporteur d'affaires ?


Pour nos clients, oui. Nous essayons aussi de convaincre certains propriétaires de faire des swaps, par exemple dans la perspective d'une succession. Mais ce n'est pas toujours évident, et pour l'instant ce type d'opération, pour nous, reste très rare. C'est que, chez les petits propriétaires individuels, on veut conserver la possibilité de toucher physiquement son capital, d'aller visiter son immeuble, de discuter avec les locataires. Ce que l'on ne peut plus faire si on l'a échangé contre des parts de fonds de placement immobilier.

 
 
Olivier Toublan pour Immoday