Les acteurs de l'immobilier titrisé de nouveau optimistes pour 2024

29/01/2024

Olivier Toublan 

Immoday

6 min

Taux d'intérêt qui vont probablement baisser, immobilier qui va reprendre de la valeur, nouveaux projets dans les pipelines, les différents acteurs de l'immobilier titrisé interrogés pendant le salon Immo24 sont tous optimistes : même si le premier semestre risque d'être de nouveau très calme, l'horizon se dégage. Voici les 15 principaux sujets de discussion qui faisaient bruire le salon.

 

Le salon Immo24 s'est tenu mi-janvier à Zurich, réunissant tous les acteurs de l'immobilier direct et indirect. Une bonne occasion de prendre le pouls du secteur après une année 2023 qui fut difficile pour tout le monde. Avec, en résumé, une constatation simple : tout le monde est de nouveau optimiste. Parfois modérément, parfois de manière plus enthousiaste. Quoi qu'il en soit, il est incontestable que l'humeur a radicalement changé depuis l'année dernière.

 

1. Les taux d'intérêt vont baisser

 

La fin de la hausse des taux est actée depuis plusieurs semaines, et elle explique d'ailleurs la forte progression de l'immobilier en décembre 2023. Certains estiment que la BNS  va maintenant les conserver au niveau actuel, pour ne pas brûler ses cartouches tant que l'économie suisse continue à se porter correctement. D'autres, au contraire, assurent que les taux négatifs sont la nouvelle normalité, que l'on va les retrouver bientôt. Sans aller jusque là, la majorité s'accorde sur le fait que la BNS va baisser ses taux en 2024. De combien ? Personne ne s'aventure. Mais, comme les taux actuels sont à peu près au niveau de l'inflation et que l'objectif de la BNS n'est pas de relancer l'économie, la baisse pourrait être de moindre ampleur qu'anticipé.

 

2. L'immobilier va reprendre de la valeur

 

S'il y a une baisse des taux, mécaniquement, l'immobilier va repartir à la hausse. Sur ce point aussi tout le monde est d'accord. Reste à savoir si la totalité de cette hausse n'a pas déjà été anticipée en décembre. D'autant plus que l'effet de rattrapage est modéré, étant donné que l'immobilier suisse, contrairement à celui de ses voisins européens, n'a pas fortement corrigé ces deux dernières années. 

 

3. Le spread va de nouveau être durablement en faveur de l'immobilier

 

Avec un rendement sur distribution des fonds immobiliers qui tourne autour des 2,7%, et des taux longs qui ne devraient pas dépasser les 1 %, le spread semble de nouveau durablement en faveur des investissements immobiliers. Si l'on fait une moyenne des estimations données par les acteurs interrogés, il faut que le spread soit environ de 150 points de base pour que les institutionnels préfèrent l'immobilier.

 

4. Les institutionnels sont de nouveau intéressés par l'immobilier

 

Dans ce contexte, les gérants de fonds constatent un changement d'attitude de la part des investisseurs institutionnels. Ils n'en sont pas encore au point d'investir massivement dans l'immobilier, mais ils se montrent à nouveau intéressés par cette classe d'actif, alors que pendant quasiment tout 2023 ils ne voulaient plus en entendre parler. Ce qui fait dire aux gérants de fonds que le premier semestre 2024 risque d'être toujours très calme, mais que la situation devrait se débloquer au deuxième semestre le temps que les investisseurs institutionnels changent d'avis. 

 

5. La hausse de décembre est probablement due à  une surréaction du marché

 

La hausse des fonds immobiliers cotés en novembre et en décembre 2023 a surpris. Pour certains, cependant, elle n'était pas complètement inattendue, plusieurs gros investisseurs, qui avaient sous-investi dans l'immobilier, devant réajuster leur portefeuille en fin d'année. Mais néanmoins personne ne s'attendait à une progression de cette ampleur. Ce qui fait dire à plusieurs gérants que le marché a probablement surréagi, entraîné par les promesses de baisse des taux.

 

6. Certains vendeurs tergiversent de nouveau

 

Si, dans son ensemble, les prix de l'immobilier suisse ont bien résisté à la hausse des taux, mieux que ceux de ses voisins européens, les acteurs ont quand même constaté des baisses parfois importantes, comme, par exemple, dans le centre de Genève pour des immeubles peu durables. Avec la possible baisse des taux et une reprise de l'immobilier, certains vendeurs hésitent désormais à vendre. Ils se disent qu'il vaut mieux attendre que les prix se reprennent.

 

7. Les vendeurs ont toujours de la peine à intégrer la durabilité dans leur prix

 

Plus largement, tous les gérants de fonds constatent que les vendeurs n'ont pas encore entièrement intégré les critères ESG dans leurs prix. Alors, qu'il est aujourd'hui, pour un fonds, impossible d'acheter un immeuble énergivore sans déduire de ce prix d'achat les investissements nécessaires pour rétablir sa durabilité. 

 

8. Les critères ESG deviennent incontournables

 

Cette situation est d'autant plus problématique pour les fonds que les considérations ESG sont désormais devenues un des critères incontournables pris en compte dans les décisions d'achat. Non seulement à cause des obligations légales et administratives, mais aussi de la pression des investisseurs, surtout les institutionnels.

 

9. La prime aux fonds les mieux gérer va persister

 

Même si les taux baissent, il est peu probable qu'on en revienne à l'euphorie d'avant 2022. Avec des investisseurs devenus plus prudents, et plus regardants sur les performances. Dans ce contexte, la prime aux fonds les mieux gérés, avec les portefeuilles possédant le plus de potentiel, va continuer. On le constate déjà aujourd'hui avec un nombre important de fonds qui affichent toujours un disagio, malgré la reprise du marché.

 

10. L'immobilier attire de nouveaux types d'investisseurs

 

Ces derniers mois ont vu l'arrivée de nouveaux types d'investisseurs, des petites banques, de riches privés, et surtout des Family Offices, qui commencent à s'intéresser à l'immobilier titrisé. Mais avec des demandes plus pointues que les institutionnels, attirés par des produits plus originaux et plus innovants. Ces nouveaux investisseurs acceptent également de prendre plus de risques, par exemple en misant dans des secteurs comme l'immobilier industriel ou logistique.

 

11. 2023 aura permis de prendre du recul

 

La bonne chose de cette année 2023 un peu atypique, estiment les observateurs, c'est qu’elle aura permis de prendre un peu de recul, pour repenser les stratégies, renforcer les points forts, améliorer les points faibles, et, surtout, déterminer quelle est réellement la valeur ajoutée apportée aux investisseurs. Bref, quelques mois d'introspection, de remise en question pour mieux se positionner dans un environnement immobilier qui a radicalement changé.

 

12. Plus d'attention aux coûts des fournisseurs de service

 

Ces réflexions ont poussé les fonds à faire plus attention à leur coûts. Avec, comme conséquence, de nombreuses réorganisations internes, une digitalisation accrue des processus mais aussi plusieurs changements de direction de fonds, dont les services n'étaient plus considérés comme optimaux. On dit aussi qu'il pourrait y avoir des changements de banque dépositaire.

 

13. De nombreux nouveaux projets sont en route

 

Bien entendu, personne ne peut en parler tant qu'ils ne sont pas officiellement annoncés, mais bon nombre d'acteurs ne cachent pas qu'ils ont aussi profité d'une année 2023 plus calme pour préparer de nouveaux projets, qui devraient être lancés dans les mois qui viennent. Des projets qui ne se limitent d'ailleurs pas seulement à des augmentations de capital, rendues à nouveau possibles dans un marché qui s'est stabilisé, et avec des investisseurs de nouveau intéressés par de telles opérations.

 

14. Attention de bien de tirer les bonnes leçons des turbulences 

 

Le problème avec cette reprise rapide en 2024, analysent certains acteurs, c'est que la crise n'aura pas duré assez longtemps pour que le marché puisse vraiment se purger. Avec le risque que la frénésie des nouveaux lancements, des augmentations de capital, des acquisitions immobilières reprenne et que certains ne tirent pas toutes les leçons des turbulences de ces deux dernières années.

 

15. De nouveaux acteurs pourraient apparaître

 

Finalement, la situation qu'a connue l'immobilier titrisé ces deux dernières années a fait aussi apparaître un manque d'intérêts convergents entre ce que proposaient les fonds et ce que voulaient les investisseurs dans un marché difficile. Ce qui fait dire à certains que l'on va voir ces prochaines années apparaître de nouveaux acteurs, avec des approches différentes, pour mieux répondre aux attentes des investisseurs, quelles que soient les conditions du marché. 

 
 
Olivier Toublan - Immoday.ch