L'impact du Covid-19 sur le développement du marché immobilier suisse

02/09/2021

Séverine Cauchie

Banque Lombard Odier & Cie SA

4 min

Depuis plus d'un an, la pandémie bouleverse nos vies ainsi que les marchés financiers. Nous avons été amenés à développer de nouvelles habitudes, et plus rapidement qu’autrefois. Mais quel a été l’impact d’un tel chamboulement sur le marché immobilier résidentiel? Jusqu'à présent, ce dernier a fait preuve de résilience impressionnante, mais combien de temps durera-t-elle encore ? Quelles sont les tendances qui animent le marché suisse et que lui réserve l’avenir ?
 

Un enthousiasme pour l’accession à la propriété


En temps normal, les nouvelles habitudes prennent une génération pour modifier de manière durable notre façon de vivre, travailler ou voyager. Mais la pandémie a ignoré cette règle. Plusieurs changements au sein de la demande ont eu un impact majeur sur l'immobilier résidentiel et sur sa valeur.

Depuis, les ménages ont tendance à dépenser pour le logement au détriment des vacances ; la demande de biens situés dans les zones rurales, de logements plus spacieux et d'espaces de bureau supplémentaires pour le travail à distance augmente, avec un accent sur la qualité du lieu de travail à domicile. Du fait que les gens ont recours au télétravail plusieurs jours par semaine, ces derniers sont prêts à passer plus de temps dans les voitures ou les transports en commun pour se rendre au travail.
 

En conséquent, l'accession à la propriété n'a que temporairement perdu son attrait lors de la pandémie. Dès la fin du premier confinement, la demande s'est envolée, notamment pour les objets à la montagne et les appartements. La demande pour les biens de type pavillon situés dans La Broye, la Vallée de Joux et du côté de Sion a ainsi augmenté.
 

Mais cette demande ne signifie pas que les particuliers obtiennent toujours ce qu'ils veulent. Pour quelle raison? Parce que les banques évaluent l'accessibilité sur la base de taux d'intérêts soutenables plutôt que sur les taux d'intérêt réels. Par conséquent, les biens sont inabordables pour beaucoup de gens. Plus concrètement, seuls 42 % des biens actuellement vendus sont disponibles pour les ménages à revenus moyens. Pour les maisons individuelles, ce pourcentage n'est même que de 26%.
 

 

À mesure que les prix augmenteront, ces proportions continueront de baisser. À Zurich, le prix des maisons individuelles a augmenté de près de 10 % au cours des 12 derniers mois, tandis que les prix des appartements ont stagné. Une tendance similaire peut être observée dans le bassin lémanique.
 

Dans un contexte de demande croissante dans toute la Suisse, l'offre devrait stagner cette année. De ce fait, on s'attend à ce que le prix des maisons individuelles augmente puis se stabilise en 2022, tandis que les prix des appartements dans la région lémanique et zurichoise continueront de croître.
 

Les logements locatifs restent dynamiques


Les prix de l'immobilier locatif résidentiel ont stagné l'année dernière. Toutefois, ceux-ci ont été soutenus par les investisseurs institutionnels à la recherche de rendements positifs, en francs suisses. La pandémie a certes provoqué des tensions début 2020, entraînant une baisse du prix des transactions et une baisse de l'investissement dans les immeubles locatifs. Mais cette situation n'a pas duré.
 

De fin 2020 au printemps 2021, les prix des immeubles locatifs se sont consolidés et le nombre des immeubles en construction a affiché une tendance à la hausse, indiquant un rebond du marché de la construction. Mais l'offre de logements dépasse encore la demande.
 

Cependant, la situation varie d'un canton à l'autre. Selon le Centre d’information et de formation immobilières (CIFI), les taux de vacance sont élevés dans les régions périphériques, à savoir les cantons de Suisse romande tels que le Jura, Valais et Neuchâtel, et les cantons de Suisse allemande tels que Soleure, Argovie, Turgovie et Saint-Gall (2,41 %).

La situation est différente dans les cantons fortement urbanisés, notamment à Genève, Zoug, Zurich et Bâle. Ces derniers observent une forte demande, mais avec un potentiel de développement limité. Dans ces zones, la demande est si forte que les locataires potentiels contactent eux-mêmes les gestionnaires avant que les nouveaux biens ne soient officiellement répertoriés sur le marché.
 

La performance des véhicules d'investissement reflète ces disparités. Les fonds exposés à des zones à fort taux de vacance se sont relativement moins bien comportés. Cependant, en raison de la robustesse du marché dans son ensemble, les portefeuilles résidentiels ont généralement réussi à améliorer leurs revenus locatifs, leurs résultats nets ainsi que leurs taux de distribution au cours de la dernière année.
 

Quelles sont les perspectives sur le marché boursier pour ces fonds à court terme ? 2020 a profité aux investisseurs car le cours des actions des fonds immobiliers résidentiels a rebondi depuis l’effondrement en mars suite au coronavirus. Tout au long de l'année, le secteur résidentiel a ainsi réalisé une valorisation inégalée et a surperformé le marché avec un rendement total de 16,6 %.

 
 
Séverine Cauchie, Ph.D.
Banque Lombard Odier & Cie SA